Jean-Pierre Deleuze et le Quatuor Tana

La première partie de Shôrô, pour quatuor à cordes, a été créé par le quatuor Tana à l’Académie Royale de Belgique le 6 mars 2014. Cette pièce a été composée suite à un séjour à Koya-san (ou le Mont Koya), considéré par les Japonais comme une « montagne sacrée » au même titre que le Mont Fuji. Shôrô est le mot japonais qui désigne la tour abritant une cloche, située habituellement à proximité des temples bouddhistes. Et c’est le son d’une cloche réelle, enregistrée à Koya-san, l’un des principaux centres bouddhiques du Japon, fondé vers l’an 816 par le moine Kukai, qui a servi de « modèle spectral » pour la section initiale et le cadre de cette pièce. Celle-ci est en quelque sorte l’écho des impressions que m’a données la visite de ce lieu bien singulier. Lorsque s’éteint le son de la cloche après avoir lancé son appel répété, rendant plus intense le silence qui le suit, surgissent deux « images ». La première évoque la Tamagawa, rivière au bord de laquelle a été érigé le mausolée de Kukai et qui marque symboliquement la séparation avec cet espace sacré. La deuxième témoigne de l’expérience que représente la longue traversée de l’Ukuno-in, vaste nécropole de plus de deux mille tombes, située en plein milieu d’une forêt de cèdres centenaires. Cheminer dans ce véritable « royaume des morts », qui témoigne de plus d’un millénaire de l’histoire du Japon, n’a rien de lugubre mais, au contraire, constitue une expérience sublime. Ces évocations, elliptiques et suggestives, s’enchaînant à la manière de Haïku musicaux, sont tout imprégnées de modes typiques dans une tentative de synthèse entre musique classique occidentale et musique traditionnelle japonaise. Cette résidence permettra à Jean-Pierre Deleuze et le quatuor Tana, de travailler la seconde partie de ce quatuor, qui sera créé dans le cadre du festival Ars Musica 2016, dont le thème sera « Le pays du sonore levant ».

Habitué à cette voie double, à moins qu’elle ne soit qu’une, de l’improvisation et de la composition, Benjamin de la Fuente présente son premier quatuor à cordes qui sera dédie au quatuor Tana. Ce compositeur au langage pluriel est le co-fondateur avec Samuel Sighicelli et Benjamin Dupé, de la compagnie d’invention musicale Sphota, dont le crédo est la l’élaboration de nouveaux rapports entre la musique, la scène et les publics. En 2004, il décide avec Samuel Sighicelli, de créer le groupe de Rock/Electro expérimental Caravaggio avec Eric Echampard et Bruno Chevillon. Le premier disque Caravaggio (INA-grm) est sorti en 2004. Benjamin de la Fuente écrit des pièces instrumentales avec ou sans électronique pour divers ensembles et orchestres sans oublier la musique électroacoustique et la musique pour le théâtre.